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par Djoumé Sylla, Conseiller Technique Régional UNCDF
Au détour d’un projet de pisciculture lancé à l’origine par l’UNCDF à travers le Projet ADECOI et soutenu plus tard par le Gouvernement du Benin en partenariat avec le FIDA, il y a une dizaine d’années, est née une initiative de production maraichère. Elle s’est concrétisée dès lors que l’eau a été maîtrisée à kaki-kola, un village de la commune de Tchaourou, Département du Borgou. L’ambition ultime des parties prenantes étant de solutionner durablement la problématique de l’emploi rural, la sécurité alimentaire et l’amélioration des revenus des populations.
Tout a commencé par l’implantation d’un barrage, des étangs empoissonnés et bien alimentés en eau. Leur exploitation par quelques jeunes désœuvrés, décidés à se prendre en charge ne suffisait pas à leur procurer un emploi productif sur une année entière. Partant de cet investissement initial, l’extension de la pisciculture au maraîchage a pris corps. Les groupements ont fait le relais entre différents partenaires pour diversifier leurs activités et accroître la production de contre saison au travers l’aménagement d’un périmètre de 15 hectares situés à 3 kilomètres du village de Kakikoka. La commune de Tchaourou a assuré le portage de cette initiative en l’inscrivant dans son plan annuel d’investissement et en délivrant un acte pour sécuriser le site affecté à l’activité.
Sur co financement du Fonds Belge pour la Sécurité Alimentaire (FBSA), l’UNCDF et le PNUD comme partenaires de la Commune de Tchaourou au travers les projets ADECOI, PAPEJ , PA3D et le Gouvernement du Bénin, ont soutenu techniquement et financièrement la réalisation des ouvrages d’irrigation, la fourniture d’équipements et la construction d’un centre polyvalent (comprenant un magasin pour sécuriser les outils de travail, une salle de formations et d’échange entre les groupements). L’African Development Foundation, (ADF) une fondation Américaine s’est jointe à l’initiative en mettant en place un dispositif d’arrosage avec le « système de goutte à goutte ». Les exploitants au nombre de 80 personnes dont 25 femmes ont mobilisé leurs ressources propres (évaluées à 125.000 FCFA) pour apporter quelques équipements complémentaires. Cette synergie a permis aux groupements maraîchers de disposer des facteurs de productions (la terre, l’eau, l’équipement et les intrants) et de commercialisation (hangar de vente des produits maraîchers). Résultats, les cinq groupements ont accru leur production, 80 emplois permanents ont été créés, les exploitants satisfont leurs besoins d’autoconsommation et génèrent de revenus tirés de la vente des surplus de production.
Les témoignages des exploitants et ceux des autorités locales, convergent. Ici, la vie des gens a changé positivement, ils n’ont rien à envier à la ville. Les propos du président d’un des cinq groupements qui exploitent le périmètre maraicher de Kaki-koka sont fort édifiants : « Je m’appelle Akey Abalo, et pour me retrouver plus facilement au village, dites simplement Django ! Avec ce sobriquet même un enfant pourra vous conduire chez moi ! » Ainsi s’introduisait le paysan qui constitue un cas d’école. Allogène dans le milieu, la trentaine franchie, il est venu s’installer à kaki-kola dans le but de travailler pour accroître ses revenus et faire face à ses obligations de chef de ménage.
Son parcours se confond à l’histoire du site pour avoir été au cœur des différentes évolutions des étangs et du périmètre maraicher, d’où cet autre sobriquet de « Doyen ». Il déclare avec sérénité et assurance : « J’ai tout eu sur ce site. Je produis en moyenne une tonne d’oignon par campagne, du poisson et autres spéculations. Avec mes revenus, J’ai pu me construire une maison en matériaux durables, j’ai inscrit mes enfants à l’école et j’ai même engagé un répétiteur pour mieux les encadrer, j’ai acheté une moto, trois téléphones portables dont un pour mon épouse et les deux autres me permettent de communiquer fréquemment en particulier de me renseigner sur les prix des spéculations comme l’oignon qui sont pratiqués sur les marchés environnants … » Nous le disons à sa place, il est sorti de la vulnérabilité.
L’expérience fait un appel d’air. Un défi de taille, le besoin d’investissements complémentaires (extension des réservoirs d’eau) face à l’accroissement continu du nombre d’exploitants.
Les autorités locales devront maintenir le cap en augmentant leurs investissements dans des projets productifs, en sécurisant le foncier, en renforçant les capacités des groupements et en encourageant leur mutation progressive vers des entreprises agricoles disposant de capacités réelles de production de transformation et de commercialisation de produits agricoles.
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Les opinions exprimées dans cet article ne représentent que celles de l'auteur et pas nécessairement celles des Nations unies.