2019 l’année de l’innovation au Sénégal ?
Auteur
Par Serge Moungnanou
Consultant en finance digitale, MM4P Sénégal
Pour de plus amples informations
Bery Kandji
Consultante en Communication et Gestion de Connaissances, MM4P Sénégal et Bénin
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La question mérite d’être posée quand on regarde le bilan de l’année écoulée. Les services financiers numériques (SFN) ont connu une forte croissance avec une valeur des transactions multipliée par 5 en 3 ans. L’enquête annuelle auprès de fournisseurs de services de UNCDF-MM4P a révélé que les investissements des acteurs dans la finance digitale ont une fois de plus connu une forte augmentation : +20% en 2017.
2018 a été ponctuée d’initiatives qui vont prolonger cette dynamique de croissance. Les opérateurs de transfert d’argent continuent de migrer vers des services de porte-monnaie électronique. Le secteur bancaire a étoffé sa stratégie de banque de détail, intégrant des institutions de microfinance et des fintechs à leurs opérations. Plusieurs banques ont d’ailleurs lancé des solutions bancaires sur mobile.
Du côté des opérateurs de téléphonie mobile, le groupe Orange, leader incontesté au Sénégal, a révélé son ambition d’avoir une banque d’ici 2020. Sentel GSM (Tigo) a été racheté par le trio Sow-Niel-Hiridjee et Expresso a lancé son offre mobile money E-Money.
Les fintechs ont confirmé leur montée en puissance en lançant quelques offres phares. Au cours de l’année, une multitude d’incubateurs locaux, régionaux ou internationaux se sont illustrés à travers des concours, des tables rondes ou des conférences dans l’objectif de fournir un accompagnement à ces jeunes pousses qui peuvent changer la donne sur le marché. On peut citer entre autres : CETIC, ENABLIS, JOKKOLABS, COFINA STARTUP HOUSE, Kinaya Lab, BRVM Fintech Lab, Lab innovation Afrique subsaharienne de la Société Générale, Watulab par la coopération israélienne, Dakar Finance Cluster en partenariat avec France Innovation.
Les organes de régulations se sont illustrés par des actions fédératrices, ouvrant les portes de l’innovation. Après avoir ouvert les codes USSD aux fournisseurs qui ne sont pas opérateurs de téléphonie mobile, l’ARTP a organisé un forum sur le développement des services numériques, permettant aux acteurs de partager leurs expériences sur l’usage des ressources des opérateurs de téléphonie mobile. La BCEAO a initié la semaine de l’inclusion financière pour mobiliser l’écosystème autour de la stratégie régionale d’inclusion financière et accélérer son déploiement.
Enfin les acteurs ont eu de nombreuses rencontres tout au long de l’année, par le biais du groupe de travail sur la finance digitale de UNCDF-MM4P, et ont discuté de thématiques importantes comme la digitalisation des chaînes de valeur agricole, le déploiement des agents en zone rurale et l’innovation financière digitale à travers des services comme le crédit digital.
Grâce à ces échanges constants entre acteurs et avec les régulateurs, 2018 s’est terminée avec une bonne compréhension mutuelle des défis des fournisseurs et des textes réglementaires régissant la finance digitale. Parmi ces défis on retient la tarification limitative de l’USSD pour les opérateurs non télécoms, la multitude d’interlocuteurs dans la réglementation et le cadre réglementaire complexe en ce qui concerne le déploiement d’agents de banque ou de microfinance. Malgré ces challenges, l’écosystème demeure en perpétuelle évolution.
Que nous réserve cette nouvelle année ? Les banques et institutions de microfinance vont-elles opérer un retour en force et mettre fin à la suprématie des opérateurs ? La réglementation va-t-elle céder aux demandes d’évolution incessante des acteurs ? Les SFN de deuxième génération vont-ils enfin se développer et confirmer leur impact sur la pénétration du mobile money ?
Nous avons de bonnes raisons de croire en une année 2019 riche en services financiers numériques pour l’inclusion financière des populations sénégalaises.
Au revoir 2018 et bienvenue 2019 !