Une banque au Bénin teste l’Agency Banking pour les clients des zones reculées
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Bery KANDJI
Consultante en Communication et Gestion de Connaissances
bery.kandji@uncdf.org
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Avec le boom du marché des services financiers numériques (SFN) au Bénin, la concurrence entre fournisseurs s’est accrue. Longtemps dominé par les opérateurs de téléphonie mobile, le marché intéresse d’autres acteurs, comme les banques. Celles-ci cherchent à rendre accessibles leurs offres dans les localités les plus reculées où il n’y a pas d’agence bancaire. Pour cela, elles doivent mettre en place un nouveau type de réseau de distribution à l’instar d’Ecobank Bénin qui s’est engagée dans cette nouvelle direction en 2018 avec l’appui de UNCDF.
Ecobank Bénin, leader du secteur bancaire s’est rapidement positionné comme pionnière de l’innovation numérique en lançant Ecobank Mobile en 2017, une solution de mobile banking. Inspirée par des exemples présentés lors des ateliers de partage d’expériences organisés par UNCDF, la banque a décidé de poursuivre son aventure digitale en testant « l’Agency Banking ». L’objectif pour la banque est d’atteindre de nouveaux clients, notamment les populations exclues du système bancaire classique et d’améliorer sa rentabilité à moyen terme, en économisant sur les charges fixes des agences bancaires.
Très peu développé en Afrique de l’Ouest, l’agency banking consiste à utiliser un réseau d’agents non bancaires (commerçants, détaillants, vendeurs de crédits téléphoniques, etc.) pour distribuer des services bancaires. Investir dans ce type de réseau de distribution est beaucoup moins coûteux, plus simple à déployer et à gérer que l’ouverture d’agences bancaires classiques.
Accompagné par UNCDF dans un projet pilote de 6 mois, la banque a déployé ses premiers agents, appelés Points Xpress Ecobank, dans les villes de Cotonou, Calavi, Porto Novo, Lokossa, Bohicon et Natitingou en octobre 2018. Le cabinet Amarante, mandaté par UNCDF a suivi l’implémentation technique.
L’objectif initial du pilote prévoyait un déploiement de 300 agents. A fin mars 2019, seul 174 ont été installés parmi lesquels 157 agents étaient actifs (c’est-à-dire des agents ayant réalisé des transactions pour le compte de clients au cours des trente derniers jours).
Ces résultats du pilote sont certes en deçà des niveaux de pénétration des opérateurs de téléphonie mobile, mais restent encourageants pour une première. Les prix très concurrentiels appliqués par les structures de transfert d’argent et la forte conjoncture économique n’ont pas facilité l’atteinte des objectifs du pilote. A cela s’ajoutent des défaillances techniques impactant l’accessibilité par moment de la plateforme, des difficultés de gestion et les problèmes usuels de connectivité.
Malgré ce déploiement en demi-teinte, la clientèle d’Ecobank a augmenté de 21% avec plus de huit mille comptes Xpress ouverts par le nouveau réseau d’agents. Les comptes créés par les agents sur l’application d’EcoBank permettent aux personnes ne disposant pas d’un compte en banque traditionnel d’effectuer des transactions en espèces avec des agents EcoBank Xpress ou de façon autonome via leur téléphone mobile.
« Les chiffres sont éloquents parfois même au-dessus des objectifs ; ils nous encouragent à poursuivre cette stratégie de recrutement massif des populations jusque-là non bancarisées et exclues du circuit formel. Le taux d’activité des comptes Xpress demeure notre principal défi. Nous y travaillons » selon Wilfrid BOCCO – Directeur Consumer Banking à Ecobank Bénin
En effet, le taux d’activité des clients n’a pas évolué de la même façon dans les zones du pilote. Pendant que certains points Xpress enregistraient une transaction par semaine, d’autres faisaient deux opérations par jour.
« Je reçois beaucoup de clients qui ne savent ni lire, ni écrire. Quand ils rentrent dans ma boutique, ils s’attendent souvent à ce que je porte un t-shirt ou une casquette Ecobank Mobile, pour confirmer que je suis le bon interlocuteur » a confié Sosthène, agent à Calavi.
Les opérations de communication d’Ecobank étaient insuffisantes dans certaines zones , face aux besoins ou au manque de connaissance des clients. Malgré les défis techniques et de communication rencontrés au cours de la phase pilote, Ecobank Bénin continue à déployer ses agents Xpress en tenant compte de certaines leçons apprises du pilote. Par exemple en réponse au problème de connectivité, un accès via USSD est en exploration. D’autre part, les agents qui bénéficient déjà de l’accompagnement quotidien de commerciaux dédiés, seront soutenus par des campagnes marketing adaptés pour améliorer leur taux d’activité.
Que retenir de cette première ?
Le modèle Agency Banking représente une véritable opportunité pour les banques, à condition de mettre en place des solutions techniques pour éviter les défaillances qui impactent l’accessibilité du service qui pourraient décourager certains clients. Dans le contexte ouest africain, où la connectivité demeure un véritable problème et où la pénétration des smartphones reste très faible, utiliser des technologies comme l’USSD peut faciliter l’accessibilité au service.
Par ailleurs, le pilote a montré qu’il est essentiel que les réseaux d’agents déployés soient soutenus par une force de vente dédiée et que les agents bénéficient de commissions attrayantes.
Ecobank Bénin vient d’ouvrir la voie à un nouveau modèle pour les banques d’Afrique de l’Ouest qui veulent se lancer dans le digital et recruter de nouveaux clients.
« Il est temps pour le secteur bancaire d’investir dans des canaux alternatifs pour toucher les populations qui ont le plus besoin d’être financièrement et économiquement incluses. UNCDF demeure un partenaire de choix pour soutenir les banques de la région dans leur transformation digitale en faveur de l’inclusion des plus vulnérables », selon Sabine Mensah, Spécialiste Technique Régionale de l’UNCDF
Rejoignez-nous le 5 juin 2019 pour un webinar sur les leçons apprises de ce projet!
Déploiement de points Xpress à Calavai, Cotonou, 2018
Par Hugues L.N'GBESSO et Bery KANDJI, Amarante Consulting