L’Accès à l’Information Atout pour la Production de Coton
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La filière cotonnière burkinabè, qui est essentielle pour ce pays largement sahélien, subit une réforme de grande ampleur.
Dans la filière de production du coton, les services non-financiers sont les informations propres à la filière telles que les données relatives aux prix du coton, les données météorologiques et les données relatives à des événements (marchés, formations).
Amarante Consulting, mandaté par l’équipe UNCDF au Burkina Faso, a mené une étude portant sur la cartographie de la chaîne de valeur du coton au Burkina Faso et l’identification des opportunités de digitalisation des paiements et des services non-financiers dans cette filière. Les régions de la recherche préalablement définies par UNCDF sont : le Centre-Ouest, le Centre-Sud et le Centre-Est, régions dans lesquelles les acteurs directs de la chaîne de valeur du coton ont été interviewés.
Informations disponibles pour les producteurs
La quasi-totalité (95 pourcent) des producteurs de coton rencontrés lors de l’étude fin 2020 estiment qu’ils ont accès à des informations. Et 91 pourcent des producteurs de coton estiment qu’elles leur sont utiles et contribuent à améliorer leurs activités.
« Elles nous permettent de savoir comment combattre les insectes qui détruisent les plants de coton, maïs, soja, et d’augmenter le rendement », affirme un producteur de la société coopérative (SCOOP) KALIBIE, dans le village de Kayerobo de la commune de Léo (Centre-Ouest).
Les informations reçues concernent les intrants et les équipements des répondants, les actualités de la filière (65 pourcent des répondants), telles que la maîtrise du calendrier de production, les dates précises de pesées, de ramassage et de paiements, l’apparition de parasites saisonniers, les techniques antiparasitaires, ou encore les techniques agricoles (56 pourcent des répondants) comme les semis, la pulvérisation, les conseils d’utilisation des engrais.
A l’inverse, les producteurs ont moins accès aux informations liées aux crédits agricoles, aux prix et à la météo, pourtant cruciales pour la filière.
Circuit des informations
Les informations proviennent essentiellement des médias classiques (radio et télévision), du bouche-à-oreille et des sociétés cotonnières.
En raison de l’analphabétisme qui prévaut parmi les producteurs de coton, les supports écrits (journaux, panneaux d’affichage) représentent rarement des sources d’information.
Les discussions avec les membres de SCOOP et de Groupements de Producteurs de Coton (GPC) permettent de mieux comprendre la place de la radio comme une source d’information plébiscitée notamment par les femmes. Près de la moitié des producteurs rencontrés ont désigné l’agent technique d’agriculture comme un important relais d’informations. Il est parfois appelé cob naba (chef de zone, en langue Mooré) par les producteurs. Il les informe par exemple des superficies réelles de leurs champs pour mieux dimensionner les intrants et améliorer le rendement.
« L'agent technique informe le bureau, et le bureau réunit les membres de la SCOOP pour informer. Souvent il y a des absents aux rencontres d'information, il faut encore les rechercher ou même les appeler au téléphone pour informer », propos recueillis lors du focus groupe discussion (FGD) auprès de la SCOOP Goulgoutin dans la commune de Dialgaye, dans le Centre-Est.
Force est de constater que l’information se transmet essentiellement par la parole dans la filière du coton. D’autres producteurs ont mentionné les « crieurs publics », les lieux de cultes (mosquées, églises), les marchés, et les forums des cotonculteurs comme informateur ou lieu d’information. Le mode d’information est à dominante verbale !
Besoins et attentes des producteurs en matière d’informations agricoles
Les attentes des producteurs en matière d’informations agricoles sont diverses :
- Communication en présentiel : en raison de leur faible niveau d’éducation, les producteurs ont besoin de communiquer en face-à-face avec leur interlocuteur. Or, le déplacement est synonyme de dépenses.
- Flux continu d’informations : l’union provinciale des producteurs de coton gère les données statistiques agricoles (production, intrants, équipements, pluviométrie, maladies etc.), cependant elle n’a pas de budget dédié à la communication (appels téléphoniques, messagerie électronique) ni de budget dédié aux déplacements pour rencontrer les producteurs. Pendant l’hivernage, l’information n’atteint pas tous les membres. « Il est difficile de diffuser les informations pendant la saison pluvieuse car tous les membres ne disposent pas de téléphone et d’autres dorment aux champs », propos recueillis lors du FGD auprès de la SCOOP WEZAN DIBAM, dans le Centre-Sud. Cela entraîne de fait un retard de diffusion des conseils sur les techniques de production et du prix du coton, connu après seulement le début de la campagne.
- Informations météorologiques : les producteurs ont besoin des informations météorologiques pour se préparer afin de prendre des dispositions conséquentes pour faire face aux intempéries éventuellement.
Apport du digital
Au regard des différents besoins d’informations des producteurs de coton, la digitalisation apparaît comme une solution à mettre en œuvre afin de toucher un plus grand nombre de producteurs. La digitalisation pourrait se faire par le développement d’une plateforme accessible via la technologie USSD1, très facile à utiliser avec un simple téléphone. Elle est aussi adaptée aux problèmes récurrents de connectivité en milieu rural.
La plateforme peut comprendre différentes offres de services pour informer par exemple les producteurs en temps réel de la pluviométrie avant, pendant et après la semence, voire jusqu’après la récolte, via un message téléphonique (SMS). Le service pourrait aussi intégrer des SMS pour alerter immédiatement les producteurs en cas de phénomènes climatiques extraordinaires tels qu’une pluie diluvienne, une sécheresse extrême ponctuelle. Enfin, un dernier exemple pourrait être des SMS sur les prix des produits et services qui intéressent les producteurs.
Une autre option serait l’adoption d’une solution existante dédiée à l’information météorologique et climatique en temps réel des producteurs. MLOUMA, une start-up sénégalaise, propose toute une gamme de services incluant l’information météorologique avec la solution Météo Mbay. Les autres fonctionnalités permettent la vente de produits sur une place de marché (Louma Mbay), le partage, la discussion et l’échanges d’informations (Xamsa Mbay), à destination des acteurs du monde agricole allant des producteurs, fournisseurs d’intrants, partenaires financiers, vendeurs, jusqu’aux consommateurs.
Le projet de digitalisation des informations permettra d’accroître les revenus des producteurs de coton, en renforçant leur résilience tout en améliorant l’efficience et l’efficacité de la chaîne de valeur. Avec ces services les producteurs peuvent mieux anticiper et prendre des décisions avec des informations en temps réel sur les conditions météorologiques, afin d’éviter de perdre des revenus en raison de dégâts sur la production et la récolte.
De jour en jour, l’accès à l’information a acquis une plus grande valeur dans la prise de décision des agriculteurs, des sociétés cotonnières, du secteur public, et naturellement, pour toute la chaîne de valeur du coton. C’est pourquoi on attend une information disponible, actualisée, en temps réel, qui soit en outre, opportune, fiable et exacte. Il est donc important que l’information soit accessible via tous les canaux possibles dont le digital.