UNCDF, la Direction du développement et de la coopération suisse (DDC) et l'Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Gambie (OMVG) ont saisi l'occasion unique offerte par le 9è Forum mondial de l'eau (le plus grand événement mondial sur l'eau) pour lancer l'initiative de financement « Blue Peace » en organisant un panel de haut niveau sur le thème " Soutenir et financer Blue Peace - comment investir dans la paix par l'eau ".

Le Forum mondial de l'eau est le plus grand événement mondial sur l'eau. Il est organisé tous les trois ans depuis 1997 par le Conseil mondial de l'eau, en partenariat avec un pays hôte. Le 9ème Forum est le premier du genre à être accueilli en Afrique sub-saharienne : au Sénégal. En réunissant des participants de tous les niveaux et de tous les domaines, y compris la politique, les institutions multilatérales, le monde universitaire, la société civile et le secteur privé, entre autres, le Forum mondial de l'eau offre une plateforme unique où la communauté internationale de l'eau et les principaux décideurs peuvent collaborer et réaliser des progrès à long terme sur les défis mondiaux liés à l'eau. C'était l'occasion idéale pour lancer l'Initiative de Financement Blue Peace.

Pour rappel, le Panel mondial de haut niveau sur l'eau et la paix est au cœur du Mouvement Blue Peace. Le panel avait inclus une recommandation spécifique sur la création de mécanismes de financement innovants. "L'Initiative de financement Blue Peace est une action concrète à cet égard, avec la vision de promouvoir l'accès au capital pour les entités non souveraines en utilisant l'eau comme point d'entrée pour des cadres de coopération multipartites, ce qui conduira à des économies plus durables et à des sociétés pacifiques (un dividende de paix)", a déclaré M. David Jackson, Directeur de l'Unité de Financement du Développement local de l'UNCDF.

Le panel de haut niveau a été modéré par Mme Preeti Sinha, Directrice Exécutive de l’UNCDF, et a vu les interventions pertinentes de ses orateurs.

"60% de l'eau douce dans le monde se trouvent dans des zones transfrontalières, mais seulement un tiers de ces bassins transfrontaliers ont un accord ou des cadres de coopération. Nous comprenons combien il est urgent de définir des incitations fortes pour des cadres de coopération multisectoriels et transfrontaliers dans le domaine de l'eau. Sans cadres de coopération et sans accords négociés, l'eau a traditionnellement le potentiel de créer des tensions" a déclaré S.E. M. Lamin B. Dibba, Ministre de l'Environnement, du Changement climatique et des Ressources Naturelles de la Gambie.

Toutefois, l'avenir de la coopération transfrontalière en matière d'eau ne peut être envisagé sans financement, comme l'a souligné S.E. Dr Danilo Türk, ancien président de la République de Slovénie et président du Panel mondial de haut niveau sur l'eau et la paix : "Au sein du panel, nous avons eu des réunions avec des experts en finance. En regardant les pratiques développées par divers mécanismes et cadres, nous avons réalisé que l'idée d'un mécanisme financier comme le fonds bleu doit être développée. Des plans d'investissement conjoints pour accéder au fonds, une consultation sur l'espace de sécurité, la gestion et l'atténuation des risques, toutes ces exigences ont été prises en compte par le concept de Financement de Blue Peace. Ce qui est nouveau, c'est le développement de la société spécialisée qui gérera les actifs."

Le Panel de haut niveau a également mis en avant le rôle pionnier de l'OMVG en tant que premier organisme de bassin qui met en œuvre un tel mécanisme de financement innovant. En tant qu'organisme de bassin bien établi et doté d'un cadre juridique lui conférant l'autorité nécessaire pour lever et gérer des fonds, l'OMVG a prouvé qu'il était prêt à essayer de nouveaux modes de financement. "Nous sommes une institution forte, avec une longue histoire et une forte volonté politique et le soutien des États membres, mais nous sommes toujours confrontés à des défis lorsqu'il s'agit de mobiliser des fonds. Nous remercions UNCDF et la DDC de nous accompagner dans l'exploration de mécanismes de financement innovants, notamment l'initiative de financement de la paix bleue, pour mettre en œuvre des projets dans le cadre de notre plan directeur. C'est vraiment la voie à suivre pour construire une indépendance financière qui nous permettra de mettre en œuvre des projets sans nous endetter", a déclaré le Haut-Commissaire de l'OMVG, M. Lansana Fofana.

Grâce à un processus d'assistance technique, l'OMVG est soutenu dans le développement de son plan directeur et de son plan d'investissement conjoint. Cela permettra lui d'acquérir la capacité institutionnelle nécessaire pour émettre un instrument financier - l'obligation Blue Peace -, d'accéder au marché des capitaux et d'être mieux placé pour absorber les financements, déployer les infrastructures et rembourser les investisseurs. La perspective du secteur financier et des investisseurs potentiels est importante et était très attendue lors du panel. Ainsi, le PDG de la Standard Chartered Bank pour le Sénégal et la Gambie et le Directeur des investissements de Meridiam ont confirmé un fort appétit du marché pour les opportunités d'investissement à impact régional innovant et les instruments de financement connexes tels que l'obligation Blue Peace.

"Nous devons mettre en place des mécanismes innovants de partage des risques afin d'attirer le secteur privé. Et le rôle des organismes de bassin fluvial doit être renforcé. La planification de projets transfrontaliers et la centralisation de leur gestion peuvent les rendre attrayants pour les marchés internationaux. Le secteur public est confronté à des difficultés, mais le secteur privé doit également faire des efforts pour créer des partenariats équitables et fructueux. Nous sommes prêts à investir davantage dans l'eau afin d'avoir un impact plus important sur le développement", a déclaré M. Amadou Sy, Directeur des investissements de Meridiam.

"Standard Chartered Bank est très engagée dans le soutien de cette initiative. Nous prenons des capitaux dans des régions du monde où ils sont en excès et les déplaçons vers des régions du monde où ils sont le plus nécessaires. Je suis enthousiasmé par ce mécanisme de financement Blue Peace qui permettrait de résoudre de nombreux problèmes. Les projets que nous avons réalisés se situent à un niveau étatique. Mais cette approche s'intéresse aux niveaux multinational et local. Réunir les entités souveraines pour créer une SPV que nous pourrons présenter aux marchés internationaux est révolutionnaire", a ajouté M. Chuks Ugha, PDG de la Standard Chartered Bank pour la Gambie et le Sénégal.

Le panel fut un événement fructueux. Les intervenants ont convenu que l'Initiative de Financement Blue Peace constituera une nouvelle incitation financière pour les pays et les secteurs à coopérer et à établir des accords politiques sur la gestion durable des ressources partagées, réduisant ainsi les risques et les conflits sociaux, politiques, économiques et environnementaux. Parallèlement, elle modifiera la perception de l'eau par le secteur financier, non pas comme un secteur distinct, mais comme un point d'entrée pour des opportunités d'investissement à impact multisectoriel et régional.

Par conséquent, investir dans Blue Peace permet de soutenir la réalisation de l'Agenda 2030 et de l'Agenda d'Addis-Abeba, tout en transformant l'eau d'une source potentielle de conflit en un instrument de coopération et de paix.