Issotina Nala a 32 ans et déborde d'énergie. Son enthousiasme vient d’un nouveau système de pompe et d'irrigation à énergie solaire qui devrait lui garantir un revenu décent et l’aider à soutenir ses deux femmes et leurs trois enfants dans le village de Wekete, Ouake, au nord-ouest du Bénin. Étant plus scolarisé que ses collègues agriculteurs, il est devenu le porte-parole du groupe et le promoteur du nouveau système. La communauté espère que cela encouragera leurs jeunes hommes à rester dans le village et à résister à la tentation de suivre les autres qui vont au-delà des frontières voisines, vers le Nigeria ou le Togo, en quête de travail.

Le changement climatique rend la vie des agriculteurs de plus en plus précaire au Bénin et dans une grande partie de l'Afrique de l'Ouest, poussant de nombreux jeunes hommes à quitter leurs communautés pour une nouvelle vie en ville, dans un autre pays ou même à faire un voyage périlleux en Europe. Ainsi, à Wekete , la communauté a choisi de faire des jeunes hommes les premiers bénéficiaires de leur nouveau projet de maraîchage résilient au climat dans l'espoir qu'ils se construisent un avenir plus proche de chez eux.

« Avant, il n'y avait pas d'eau. S'il n'y a plus d'eau, nous ne pouvons plus cultiver. Sans eau, le travail se terminait [à la ferme] d'octobre à mars - il n'y avait rien à faire. Maintenant, avec ce nouveau système, il y a toujours de l'eau. Il n'y a plus de temps morts à rester inactifs à la maison sans rien faire », a déclaré M. Nala. « L'argent [que je gagne] nous aidera beaucoup ! » il ajouta. « J'ai maintenant deux femmes et des enfants. Avec l'argent de ce projet, je pourrai envoyer mes enfants à l'école et ma famille sera en sécurité.

La décision des villageois de Wekete diffère des choix faits par d'autres communautés de la région. De fait, dans le village voisin de Komdè , qui est si proche que les jardins maraîchers des deux villages se côtoient, la priorité est mise sur les besoins des ménages dirigés par des femmes. Les choix faits par les deux communautés soulignent l'importance d'une prise de décision menée localement et qui répond aux besoins des personnes qui y vivent pour permettre une adaptation durable et pertinente. Le Mécanisme de financement de l’adaptation au niveau local (LoCAL), qui a acheminé les subventions à Wekete et à Komdè, met l’accent sur les consultations communautaires pour mieux identifier et répondre aux besoins locaux, avec des investissements adaptés aux pressions et aux conditions locales qui peuvent varier d'un village à l'autre.

« Parce qu'il y a une pénurie d'eau, due au changement climatique, on constate que les jeunes ne sont pas occupés lors de la saison 'morte'. Entre Novembre et Mars ou Avril, ils sont pratiquement inactifs. Pendant cette période, les jeunes sont obligés d'aller ailleurs à la recherche de travail », a déclaré Cossoba Nanako, responsable des programmes UNCDF Bénin, qui met en œuvre LoCAL en partenariat avec le gouvernement.

« Maintenant [avec le nouveau système d'irrigation], les jeunes peuvent rester au village et produire pour manger. Ils ont maintenant une meilleure sécurité alimentaire et nutritionnelle au niveau local – ils ont suffisamment de légumes par exemple - qui sont chers à acheter pendant la saison sèche », a-t-il ajouté.

Partout dans le monde, des millions de personnes quittent leur foyer chaque année, migrant à l'intérieur du pays ou à l'étranger à la recherche d'un travail et d'une vie meilleure. Dans les Pays en Développement, les Pays les Moins Avancés (PMA) ou dans les pays d’Afrique, beaucoup de ceux qui partent ne reviennent jamais vivre dans leur village ou ni même dans leur pays natal – certains sont prêts a tout risquer dans l’espoir d’un meilleur avenir dans un autre pays ou sur un autre continent. Ces dernières années, le changement climatique et les chocs climatiques éloignent de plus en plus de personnes de leurs lieux de résidence habituels. Selon la Banque mondiale , quelque 256 millions de personnes vont devoir migrer en raison du changement climatique au cours des 30 prochaines années. Mais selon le dernier rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur le changement climatique de l'ONU ce chiffre pourrait être réduit en augmentant les capacités d'adaptation des communautés dans les zones de migration.

Les subventions pour la résilience climatique basées sur la performance garantissent que les fonds parviennent aux autorités gouvernementales locales par le biais des systèmes de transferts fiscaux existants. Suite aux consultations communautaires, les autorités locales sélectionnent les investissements qui répondent aux besoins de la communauté à partir d'un menu d'investissements éligibles, rédigé avec le soutien de LoCAL et qui tient compte des prévisions climatiques et des vulnérabilités. La mise en œuvre et l'usage des fonds font ensuite l'objet d'un suivi. Les collectivités locales qui satisfont ou dépassent un ensemble de conditions minimales préalablement convenues sont « récompensées » par des subventions plus importantes lors du prochain cycle d'investissements, ce qui se traduit par un cercle vertueux d'apprentissage.

Dans la commune de Ouaké , les agents de la commune ont écouté les besoins de leur communauté et ont compris que la mise en œuvre d'un projet d'irrigation pouvait répondre aux besoins des deux villages s'ils avaient la liberté de sélectionner les bénéficiaires du projet.

"Ce site nous permet de résoudre un certain nombre de problèmes: il donne les moyens aux gens et il répond aux besoins des jeunes", a déclaré Comi Coubeou , chef de la division des services techniques et point focal agricole de la mairie de la commune de Ouaké , où se trouvent à la fois Wekete et Komdè .

"Si vous voyez le groupe de jeunes", a déclaré M. Coubeou en désignant M. Nala et les autres jeunes hommes, "c'est juste ces jeunes qui s'égarent, qui partent vers des villes, d'autres pays, pour trouver des terres fertiles - [ ce serait bien si ce projet] nous permet de retenir ces jeunes ici, contrairement aux autres qui sont déjà partis.

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